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Résumé : Deux vagabonds, Vladimir et Estragon, se retrouvent sur scène, dans un non-lieu (« Route de campagne avec arbre ») à la tombée de la nuit pour attendre « Godot ». Cet homme - qui ne viendra jamais - leur a promis qu'il viendrait au rendez-vous ; sans qu'on sache précisément ce qu'il est censé leur apporter, il représente un espoir de changement. En l'attendant, les deux amis tentent de trouver des occupations, des "distractions" pour que le temps passe.

Mon avis : Depuis le collège, cette pièce ou plutôt son titre m'intriguait. Un jour, j'ai eu l'envie de lire cette pièce dite absurde de Beckett, avant de lire Fin de partie du même auteur dans le cadre du cours de Littérature. Je voulais m'imprégner du style de l'auteur, acquérir quelque base sur le théâtre beckettien avant de l'aborder au lycée. J'ai bien fait ! Cette pièce est une très belle entrée dans l'univers de Beckett, pièce qui l'a rendu célèbre. Avec le recul, je peux même dire que j'ai presque adoré ! C'est à la fois bref, sensible, incompréhensible, cynique, vaporeux, émouvant, agressif, tragique, comique, répétitif... presques tous les qualificatifs peuvent lui être attribués. Cette pièce n'a aucun sens en soi. Et c'est bien là le souhait de Beckett (cf "Morceau choisi", ci-dessous). Pour apprécier la pièce, il faut la voir/lire telle qu'elle vient, la laisser venir à nous, la parcourir des yeux sans pour autant chercher à la comprendre. Cependant, chaque chose a un sens, même ce qui n'en a pas, en a ! Tout vient d'un cheminement de pensées ou d'actions. Alors, il est vrai que nous pouvons trouver un sens à cette pièce ("Godot" = "God" = "Dieu"), ou même psychanalyser Beckett à travers les échanges intersubjectifs de ses personnages, mais je ne pense pas que ce soit le but premier de la pièce. Ne cherchez pas le sens, il viendra tout seul à vous une fois la pièce finie.
Conclusion : Pièce classique de l'anti-théâtre, à voir ou à lire d'urgence !
Ma note : 16/20.

Morceau choisi : Quatrième de couverture, Lettre à Michel Polac, janvier 1952
« Vous me demandez mes idées sur En attendant Godot, dont vous me faites l'honneur de donner des extraits au Club d'essai, et en même temps mes idées sur le théâtre.
Je n'ai pas d'idées sur le théâtre. Je n'y connais rien. Je n'y vais pas. C'est admissible.
Ce qui l'est sans doute moins, c'est d'abord, dans ces conditions, d'écrire une pièce, et ensuite, l'ayant fait, de ne pas avoir d'idées sur elle non plus.
C'est malheureusement mon cas.
Il n'est pas donné à tous de pouvoir passer du monde qui s'ouvre sous la page à celui des profits et pertes, et retour, imperturbable, comme entre le turbin et le Café du Commerce.
Je ne sais pas plus sur cette pièce que celui qui arrive à la lire avec attention.
Je ne sais pas dans quel esprit je l'ai écrite.
Je ne sais pas plus sur les personnages que ce qu'ils disent, ce qu'ils font et ce qui leur arrive. De leur aspect j'ai dû indiquer le peu que j'ai pu entrevoir. Les chapeaux melon par exemple.
Je ne sais pas qui est Godot. Je ne sais même pas, surtout pas, s'il existe. Et je ne sais pas s'ils y croient ou non, les deux qui l'attendent.
Les deux autres qui passent vers la fin de chacun des deux actes, ça doit être pour rompre la monotonie.
Tout ce que j'ai pu savoir, je l'ai montré. Ce n'est pas beaucoup. Mais ça me suffit, et largement. Je dirai même que je me serais contenté de moins.
Quant à vouloir trouver à tout cela un sens plus large et plus élevé, à emporter après le spectacle, avec le programme et les esquimaux, je suis incapable d'en voir l'intérêt. Mais ce doit être possible.
Je n'y suis plus et je n'y serai plus jamais. Estragon, Vladimir, Pozzo, Lucky, leur temps et leur espace, je n'ai pu les connaître un peu que très loin du besoin de comprendre. Ils vous doivent des comptes peut-être. Qu'ils se débrouillent. Sans moi. Eux et moi nous sommes quittes ».