Mots

Ce cadavre est exquis...

Lundi 30 août 2010 à 0:50

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Résumé : Don Juan est un personnage que Molière a contribué à élever au rang de mythe. Sous sa plume, il est bien plus qu'un ordinaire séducteur. Il s'insurge avec brio contre la fidélité en prétendant que « la constance n'est bonne que pour les ridicules » et revendique un manque de respect total pour les valeurs morales de son temps.
Ses propos résonnent-ils à notre oreille comme ceux d'un provocateur, d'un instable, d'un cynique qu'on approuve, au fond, tout en feignant de se scandaliser ?
Ambigu et complexe, charmeur et révoltant, Don Juan n'a pas cessé de nous interpeller.

Mon avis : Cette pièce de théâtre, je l'ai étudié en classe dans le cadre de la séquence Théâtre : texte et représentation. Dans cette comédie, Molière est plus sérieux, il fait appel à l'esprit critique du spectateur pour s'interroger par exemple sur le mariage ou la religion. Autant dire que la pièce fut aussitôt l'objet d'attaques des religieux, très vivement critiqués dans Dom juan. C'est assez agréable de voir un héros en totale opposition avec les moeurs de son époque, de cela, on peut dire que le personnage mythique est romantique. Ce qui est d'autant plus intéressant, c'est l'ambiguïté. Molière joue avec l'ambiguïté : est-il d'accord avec ce personnage dont la soif de liberté est insatiable ? On ne le sait guère. Le fait-il brûler dans les flammes de l'Enfer juste pour une morale sauve ? C'est vraiment cet aspect là que j'ai aimé dans ce Molière. Sinon, je n'ai pas aimé. Déjà que j'ai du mal avec le théâtre alors, en plus, Molière que je trouve banal et inintéressant (peut-être qu'à l'époque je l'aurais trouvé révolutionnaire...) ! Ironie du sort : à mon oral de français, je suis "tombé dessus". Résultat : un minable 10 (heureusement que j'ai eu 16 à l'écrit). Molière, ça passe pas.
Conclusion : Une pièce intéressante mais pas extraordinaire.
Ma note : 12/20.

Morceau choisi : L'éloge de l'hypocrisie (et accessoirement texte de mon oral)
DON JUAN.
Il n'y a plus de honte maintenant à cela, l'hypocrisie est un vice à la mode, et tous les vices à la mode passent pour vertus, le personnage d'homme de bien est le meilleur de tous les personnages qu'on puisse jouer aujourd'hui, et la profession d'hypocrite a de merveilleux avantages. C'est un art de qui l'imposture est toujours respectée, et quoi qu'on la découvre, on n'ose rien dire contre elle. Tous les autres vices des hommes sont exposez à la censure, et chacun a la liberté de les attaquer hautement, mais l'hypocrisie est un vice privilégié, qui de sa main ferme la bouche à tout le monde, et jouit en repos d'une impunité souveraine. On lie à force de grimaces une société étroite avec tous les gens du parti ; qui en choque un, se les attire tous sur les bras, et ceux que l'on sait même agir de bonne foi là-dessus, et que chacun connaît pour être véritablement touchés : ceux-là, dis-je, sont toujours les dupes des autres, ils donnent hautement dans le panneau des grimaciers, et appuient aveuglément les singes de leurs actions. Combien crois-tu que j'en connaisse, qui par ce stratagème ont rhabillé adroitement les désordres de leur jeunesse, qui se sont fait un bouclier du manteau de la religion, et sous cet habit respecté, ont la permission d'être les plus méchants hommes du monde ? On a beau savoir leurs intrigues, et les connaître pour ce qu'ils sont, ils ne laissent pas pour cela d'être en crédit parmi les gens, et quelque baissement de tête, un soupir mortifié, et deux roulements d'yeux rajustent dans le monde tout ce qu'ils peuvent faire. C'est sous cet abri favorable que je veux me sauver et mettre en sûreté mes affaires. Je ne quitterai point mes douces habitudes, mais j'aurai soin de me cacher, et me divertirai à petit bruit. Que si je viens à être découvert, je verrai sans me remuer prendre mes intérêts à toute la cabale, et je serai défendu par elle envers, et contre tous. Enfin, c'est là le vrai moyen de faire impunément tout ce que je voudrai. Je m'érigerai en censeur des actions d'autrui, jugerai mal de tout le monde, et n'aurai bonne opinion que de moi. Dès qu'une fois on m'aura choqué tant soit peu, je ne pardonnerai jamais, et garderai tout doucement une haine irréconciliable. Je ferai le vengeur des intérêts du Ciel, et sous ce prétexte commode, je pousserai mes ennemis, je les accuserai d'impiété, et saurai déchaîner contre eux des zélés indiscrets, qui sans connaissance de cause crieront en public contre eux, qui les accableront d'injures, et les damneront hautement de leur autorité privée. C'est ainsi qu'il faut profiter des faiblesses des hommes, et qu'un sage esprit s'accommode aux vices de son siècle.

Lundi 30 août 2010 à 17:40

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Quatrième de couverture :
Echoués à la suite d’un naufrage sur une île gouvernée par des esclaves fugitifs, une coquette et un petit-maître perdent la liberté tandis que leurs esclaves désormais affranchis deviennent maîtres – et leur font subir diverses épreuves : « Nous vous jetons dans l’esclavage pour vous rendre sensibles aux maux qu’on y éprouve ; nous vous humilions, afin que, nous trouvant superbes, vous vous reprochiez de l’avoir été. » En 1725, c’est un monde social renversé que Marivaux donne à voir sur la scène du Théâtre-Italien : la fragilité du pouvoir peut ainsi se dévoiler, les rancœurs enfouies se libérer, et le malheur d’une condition servile s’éprouver. Mais si l’inversion est bien politique, elle est également ludique, et cette pièce sérieuse aux faux airs d’utopie est bien une comédie : le spectateur s’y amuse aux dépens des maîtres que leurs valets caricaturent, et il rit autant des maladresses que commettent ces valets lorsqu’ils tiennent le rôle des maîtres.

Mon avis : Cette pièce nous expose les relations de l'époque entre les classes sociales, et les critique. Marivaux crée de toute pièce une île où les rôles sont inversés pour le plus grand bonheur des esclaves et pour le plus grand malheur des maîtres. Au début, désireux de vengeance, les esclaves ont finalement pitié de leur maîtres et les libèrent. Ils finissent par accepter leur condition. Les maîtres quant à eux prennent conscience de leur dureté. Morale : les esclaves doivent rester esclaves car ils ne sont pas de bons maîtres et les maîtres doivent être moins sévères. Pas très original tout ça. Marivaux utilise le docere, placere : il utilise l'humour pour instruire. Il reprend également des personnages stéréotypés, par exemple, Arlequin est issu de la commedia dell'arte, pour rendre le spectacle plaisant. Le tout fait moins d'une centaine de pages d'après mes souvenirs et se lit en moins d'une heure, aucune difficulté de compréhension. On regrettera cependant que Marivaux n'ait pas été jusqu'au bout de son idée : à la fin du livre, j'ai ressenti une impression d'inachevé. On dirait plus une esquisse qu'une véritable pièce de théâtre.
Conclusion : Un pièce sympathique mais loin d'être extraordinaire.
Ma note : 12/20.

Morceau choisi : La conclusion de Trivelin
TRIVELIN : Vous me charmez. Embrassez-moi aussi, mes chers enfants ; c'est là ce que j'attendais. Si cela n'était pas arrivé, nous aurions puni vos vengeances, comme nous avons puni leurs duretés. Et vous, Iphicrate, vous, Euphrosine, je vous vois attendris ; je n'ai rien à ajouter aux leçons que vous donne cette aventure. Vous avez été leurs maîtres, et vous en avez mal agi ; ils sont devenus les vôtres, et ils vous pardonnent ; faites vos réflexions là-dessus. La différence des conditions n'est qu'une épreuve que les dieux font sur nous : je ne vous en dis pas davantage. Vous partirez dans deux jours et vous reverrez Athènes. Que la joie à présent, et que les plaisirs succèdent aux chagrins que vous avez sentis, et célèbrent le jour de votre vie le plus profitable.

Mardi 31 août 2010 à 16:30

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Résumé : Garcin, révolutionnaire lâche et mari cruel : douze balles dans la peau ; Inès, femme démoniaque qui rendra folle de douleur sa jeune amante : asphyxie par le gaz ; Estelle, coquette sans coeur qui noie son enfant adultérin : pneumonie fulgurante. Morts, tous les trois. Mais le plus dur reste à faire. Ils ne se connaissent pas, et pourtant, ils se retrouvent dans un hideux salon dont on ne part jamais. Ils ont l'éternité pour faire connaissance : quelques heures leur suffiront pour comprendre qu'ils sont leurs bourreaux respectifs. "L'enfer, c'est les autres".

Mon avis : Bon bah c'est du Sartre ! Sûrement une de ses pièces les plus connues avec Les mains sales. Elle sert, comme toutes les oeuvres de Sartre, à illustrer la philosophie existentialiste athée. Dans celle-ci, Sartre prend comme thèmes la mort et l'éternité, mais ce n'est pas sur cela qu'il se propose d'insister : d'après ce que j'ai compris, il veut montrer qu'on ne vit qu'à travers le regard des autres. D'où le fameux "L'enfer c'est les autres", souvent mal compris. Jipé nous explique : "Mais « l'enfer c'est les autres » a été toujours mal compris. On a cru que je voulais dire par là que nos rapports avec les autres étaient toujours empoisonnés, que c'était toujours des rapports infernaux. Or, c'est tout autre chose que je veux dire. Je veux dire que si les rapports avec autrui sont tordus, viciés, alors l'autre ne peut être que l'enfer. Pourquoi ? Parce que les autres sont, au fond, ce qu'il y a de plus important en nous-mêmes, pour notre propre connaissance de nous-mêmes. Quand nous pensons sur nous, quand nous essayons de nous connaître, au fond nous usons des connaissances que les autres ont déjà sur nous, nous nous jugeons avec les moyens que les autres ont, nous ont donné, de nous juger. Quoi que je dise sur moi, toujours le jugement d'autrui entre dedans. Quoi que je sente de moi, le jugement d'autrui entre dedans. Ce qui veut dire que, si mes rapports sont mauvais, je me mets dans la totale dépendance d'autrui et alors, en effet, je suis en enfer. Et il existe une quantité de gens dans le monde qui sont en enfer parce qu ils dépendent trop du jugement d'autrui. Mais cela ne veut nullement dire qu'on ne puisse avoir d'autres rapports avec les autres, ça marque simplement l'importance capitale de tous les autres pour chacun de nous." Bon, on aime ou on n'aime pas. Moi j'aime. Cette pièce est courte, très compréhensible. Elle est sérieuse et drôle à la fois - rappelons que le premier but de Sartre était que cette pièce soit drôle, malheureusement pour lui, personne n'a ri pendant la première représentation. Les personnages (un lâche, une lesbienne et une mondaine) sont attachants malgré leur méchanceté. J'aime Sartre, sa philosophie et j'ai donc aimé cette pièce.
Conclusion : Une pièce "classique" du XXème siècle. À lire !
Ma note : 15/20.

Morceau choisi :
Le véritable enfer
"Alors c'est ça l'enfer. Je ne l'aurais jamais cru… Vous vous rappelez : le souffre, le bûcher, le gril.. Ah quelle plaisanterie. Pas besoin de gril, l'enfer c'est les autres."

Lundi 6 septembre 2010 à 19:30

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Article issu de mon autre blog : http://www.ARTE.cowblog.com/

Quatrième de couverture :
« Mon ami Serge a acheté un tableau. Un tableau blanc avec des liserés blancs ». Médecin dermatologue, Serge aime l’art moderne et Sénèque – qu’il trouve "modernissime". Ingénieur dans l’aéronautique, Marc a des goûts plus traditionnels et ne comprend pas que son ami puisse acheter "cette merde" deux cent mille francs. Quant à Yvan, il aimerait bien ne contrarier aucun de ses deux précieux amis. Mais les disputes esthétiques autour du tableau blanc dégénèrent dans un crescendo hilarant et féroce qui ne laissera personne indemne...

Mon avis : Une pièce très moderne (comme le tableau) qu'on peut lire d'une traite tant le sujet est intéressant et fort. En effet, bien plus qu'un débat autour de l'art, c'est la vie de chacun qui est exposé ici sans concession, avec sincérité.
Cette pièce m'a d'ailleurs rappeler par certains points Huis Clos de Jean-Paul Sartre : trois personnages s'affrontent et se déchirent. "L'enfer c'est les autres", cette phrase peut s'appliquer à cette pièce : les trois amis sont les bourreaux des autres.
Serge est un bobo, un peu snob, qui s'intéresse à l'art, et plus particulièrement à l'art contemporain, il a acheté un véritable "Antrios" (par intérêt ou provocation, les deux ?). Marc est un bourgeois traditionnel, sans grand intérêt, bourré de préjugés sur l'art et sur la vie. Yvan, lui plus pauvre, moins chanceux, a le cul entre deux chaises : ses deux meilleurs amis se disputent à propos d'une "merde", il essaie de les réconcilier, finalement, ce sera lui le dindon de la farce... il est cet élément comique et ridicule qui met en valeur les deux autres personnages et leurs propos. Si l'on schématise la pièce et son idée, on peut dire que la tradition stricte et sobre (Marc) rencontre la modernité scandaleuse (Serge). Deux mondes opposés, pourtant amis...
Mais revenons sur l'idée de la pièce et les questions que l'on peut se poser. On peut affirmer, sans trop de doute, que la question principale que nous pose Yasmina Reza dans cette pièce est la suivante : Jusqu'où peut aller l'Art ? Sans se positionner clairement (malgré une fin explicite), elle fait parler deux partis antithétiques mais pourtant bien proches : le défenseur de l'art classique, où la beauté et le respect des règles sont de mise, et le protecteur de l'art contemporain, "l'art pour l'art". Finalement, nous, lecteurs et amateurs d'art, sommes Yvan. Qui soutenir ? J'aime bien l'art classique, mais j'aime aussi beaucoup l'art contemporain. J'aime Marc et Serge. Pourtant il faut choisir : alors je fuis...
La pièce (et le tableau) fait bien sûr illusion à Malevitch et au suprématisme qui a repoussé les limites de l'art pictural, voire de l'Art tout court, en proposant par exemple un Carré blanc sur fond blanc. L'art se suffit-il à lui-même ? C'est la seconde question que se pose et nous pose Yasmina Reza. Pour elle, chacun peut voir dans ce genre d'art ce qu'il veut y voir. N'est-ce pas le meilleur moyen de s'évader ? L'illusion d'avoir créer un sens au tableau ne nous le rend-il pas encore plus précieux qu'il ne l'est déjà ? Car nous devenons le créateur à la place du peintre. Et si l'art futur c'était cela ? Un art qui laisse libre cour à l'imagination et dont nous sommes tous et toutes les auteurs en nous-mêmes, un art individuel.
Conclusion : Une pièce qui deviendra un classique tant le sujet s'adresse à tout le monde. Cette oeuvre parle d'art et pourtant, elle-même, est de l'art : la mise en abyme est élégante. À lire !
Ma note : 18/20.

Mercredi 13 octobre 2010 à 22:40

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Résumé : Nous sommes en Pologne où Ubu, ancien roi d'Aragon et capitaine des dragons, jouit d'une haute situation et de la faveur du roi. Mais sa femme, la Mère Ubu, n'est pas satisfaite de ce rang : elle aspire au trône et réussit à convaincre son mari en évoquant les 'andouilles' qu'il pourrait manger en s'enrichissant. Ubu décide alors de monter une conspiration avec le vaillant capitaine Bordure.

Mon avis : Livre lu en fin de première, avant le bac. Depuis le temps que j'entendais parler de cette pièce ! J'en avais étudié quelques extraits en français et en histoire des arts. Je trouvais ça assez marrant et anti-conformiste. Le personnage d'Ubu et sa démesure me faisaient rire. Je trouvais aussi intéressant la relation qu'entretenait ce personnage avec Shakespeare (Oui oui ! "Shakespeare" = "Shakes-pear" = "Remue-poire", d'où la forme de poire d'Ubu) et la pièce en elle-même avec Macbeth. J'ai donc emprunté le livre au CDI de mon lycée, j'en ai lu une bonne partie en cours de maths (ahah) et j'ai dû finir le livre en fin d'après-midi. Le début est vraiment marrant avec la psychologie ridicule d'Ubu et ses "merdre" à répétition. Puis très vite, cela devient lassant. En vérité, je ne me souviens même plus de la moitié de l'histoire : c'est dire si ça m'a intéressé ! Sinon, Ubu est un symbole de l'homme vil et stupide qui veut toujours plus, de l'homme cupide, avide de pouvoir et de puissance. Il personnifie une facette plus ou moins cachée en chacun de nous : c'est cela aussi qui fait la force de cette farce, car elle s'attaque à nous - ce principe n'est pas sans rappeler le docere placere de l'époque classique.
Conclusion : Une pièce sympathique à ne pas lire en une seule fois mais par petits bouts pour éviter la lassitude. L'histoire n'est pas passionnante, il faut plus voir la pièce comme pionnière du mouvement surréaliste et du théâtre de l'absurde pour y trouver de l'intérêt.
Ma note : 12/20.

Morceau choisi : III, 7

PERE UBU
Messieurs, la séance est ouverte et tâchez de bien écouter et de vous tenir tranquilles. D'abord, nous allons faire le chapitre des finances, ensuite nous parlerons d'un petit système que j'ai imaginé pour faire venir le beau temps et conjurer la pluie.

UN CONSEILLER
Fort bien, monsieur Ubu.

MERE UBU
Quel sot homme.

PERE UBU
Madame de ma merdre, garde à vous, car je ne souffrirai pas vos sottises. Je vous disais donc, messieurs, que les finances vont passablement. Un nombre considérable de chiens à bas de laine se répand chaque matin dans les rues et les salopins font merveille. De tout côtés on ne voit que des maisons brûlées et des gens pliant sous le poids de nos phynances.

LE CONSEILLER
Et les nouveaux impôts, monsieur Ubu, vont-ils bien?

MERE UBU
Point du tout. L'impôt sur les mariages n'a encore produit que 11 sous, et encore le Père Ubu poursuit les gens partout pour les forcer à se marier.

PERE UBU
Sabre à finances, corne de ma gidouille, madame la financière, j'ai des oneilles pour parler et vous une bouche pour m'entendre. (Eclats de rire.) Ou plutôt non! Vous me faites tromper et vous êtes cause que je suis bête! Mais, corne d'Ubu! (Un messager entre.) Allons, bon, qu'a-t-il encore celui-là? Va-t'en, sagouin, ou je te poche avec décollation et torsion des jambes.

MERE UBU
Ah! le voilà dehors, mais il y a une lettre.

PERE UBU
Lis-la. Je crois que je perds l'esprit ou que je ne sais pas lire. Dépêche-toi, bouffresque, ce doit être de Bordure.

MERE UBU
Tout justement. Il dit que le czar l'a accueilli très bien, qu'il va envahir tes Etats pour rétablir Bougrelas et que toi tu seras tué.

PERE UBU
Ho! ho! J'ai peur! J'ai peur! Ha! je pense mourir. O pauvre homme que je suis. Que devenir, grand Dieu? Ce méchant homme va me tuer. Saint Antoine et tout les saints, protégez-moi, je vous donnerai de la phynance et je brûlerai des cierges pour vous. Seigneur, que devenir?

Il pleure et sanglote.

MERE UBU
Il n'y a qu'un parti à prendre, Père Ubu.

PERE UBU
Lequel, mon amour?

MERE UBU
La guerre!!

TOUS
Vive Dieu! Voilà qui est noble!

PERE UBU
Oui, et je recevrai encore des coups.

PREMIER CONSEILLER
Courons, courons organiser l'armée.

DEUXIEME
Et réunir les vivres.

TROISIEME
Et préparer l'artillerie et les forteresses.

QUATRIEME
Et prendre l'argent pour les troupes.

PERE UBU
Ah! non, par exemple! Je vais te tuer, toi, je ne veux pas donner d'argent.

En voilà d'une autre! j'étais payé pour faire la guerre et maintenant il
faut la faire à mes dépens. Non, de par ma chandelle verte, faisons la
guerre, puisque vous en êtes enragés, mais ne déboursons pas un sou.

TOUS
Vive la guerre!

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